La réforme des Collectivités Territoriales

Publié le par Dominique CARRE

La réforme des Collectivités Territoriales vient d'être adoptée par les deux chambres du parlement après de longs et houleux débats entre majorité et opposition, mais également au sein de la majorité.

Les sénateurs ont fait de la résistance jusqu'au bout pour contraindre le gouvernement à réviser sa copie, mais rien n'y a fait. Après que le sénat ait voté un texte amendé en première lecture, le gouvernement a réintroduit les mesures refusées par les sénateurs, et la loi a été adoptée par les deux assemblées avec l'ensemble des dispositions du gouvernement, à l'exception de la clause de compétence générale dont la suppression a été reportée.

 

Cette réforme comporte les mesures suivantes :

  • Regroupement des Collectivités Territoriales autour de deux pôles : 
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    • Un pôle Départements / Région

      Cette partie de la réforme amène à la suppression des mandats de "Conseillers Généraux" et "Conseillers Régionaux", et à leur remplacement par un nouveau mandat de "Conseiller Territorial".
      Le Conseiller Territorial cumulera de fait les deux fonctions de représentation de son canton au Conseil Général et au Conseil Régional.

      De fait également, la composition du Conseil Régional est donc transformée en assemblée de représentants de cantons, alors qu'elle était le résultat d'un scrutin de liste dans l'ancien système.

      Cette partie de la réforme s'accompagne d'un redécoupage des cantons sur l'ensemble des départements.

      Le département de la Vienne passera par exemple de 38 Conseillers Généraux et 13 Conseillers Régionaux avant la réforme à 25 Conseillers Territoriaux après.  
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    • Un pôle Communes / Intercommunalités

      La date du 30 juin 2013 est fixée pour l'achèvement de la couverture intercommunale du territoire Français. A cette date donc, toutes les communes de France devront être intégrée dans une intercommunalité.
      Par ailleurs la réforme prévoit de renforcer la cohérence des périmètres des Etablissements Public de Coopération Intercommunale (EPCI). Autrement dit, la chasse aux syndicats intercommunaux est ouverte !

      Le dispositif prévoit l'élection des représentants de communes dans les intercommunalités, au suffrage universel direct, par "fléchage" des premiers candidats sur les listes municipales.


  • L'élection du Conseiller Territorial sera organisée au scrutin uninominal à deux tours. Nous avons échappé au scrutin uninominal à un tour, que le gouvernement a tenté de faire passer dans ses premières propositions.

 

  • La redéfinition des compétences de chaque collectivité, avec pour objectif annoncé par le gouvernement de supprimer la clause de compétence générale aux niveaux Région et Département.
    Cette dernière mesure a été reportée à 2015. 

 

Décryptons ensemble avec le site : Défendons nos territoires

CE QUE LE GOUVERNEMENT DIT
Trop d’élus, qui coûteraient trop cher ?

 

Argument faux, démagogique et malsain.

 

 

Plus de 70% des élus de la République ne perçoivent aucune indemnité.

 

Sur 530 000 élus, la réforme territoriale ne concerne que les 6000 conseillers généraux et régionaux dont le nombre total serait ramené à 3000. Soit moins de 2% des élus et une « économie » au maximum de 1/1000 des dépenses de fonctionnement des départements et des régions.

Les indemnités des élus locaux représentent en moyenne seulement 0,4% du budget des collectivités locales, chiffre constant depuis plusieurs années.

 

 

 

Trop de niveaux de collectivités ?

 

La quasi-totalité des grands pays européens ont eux aussi trois niveaux de décision, correspondant aux communes, aux départements et aux régions.

A chaque niveau de collectivité correspond une fonction particulière : aux communes, la proximité de la gestion locale et de la vie quotidienne de nos concitoyens ; aux départements, la gestion des politiques de solidarité ; aux régions, la stratégie de l’aménagement du territoire et du développement économique, des infrastructures et de l’environnement.

Si le Gouvernement veut simplifier l’administration territoriale de l’Etat, pourquoi ajoute-t-il les métropoles, les pôles métropolitains et les communes nouvelles à la structure actuelle ? Pourquoi repousser à l’automne prochain la loi de clarification des compétences ?

 

 

 

Des collectivités mal gérées ?

 

Le poids de la dette des collectivités représente aujourd’hui 6,9% du PIB, soit près d’un point de moins qu’il y a 10 ans. La dette locale est évaluée à quelque 132 milliards soit 10 fois moins que l’Etat. Les collectivités locales, elles, ne peuvent voter leur budget de fonctionnement en déficit !

 

 

 

Trop d’embauches dans les collectivités ?

 

Les effectifs dans la fonction publique territoriale ont connu une hausse moyenne évaluée à un peu plus de 4,5% au 31 décembre 2007. L’INSEE souligne que « les deux tiers de cet accroissement sont absorbés par les conseils régionaux et départementaux. C'est la conséquence du mouvement d'intégration des personnels titulaires de l'Etat dans la fonction publique territoriale, prévu par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales. Les collectivités territoriales ont dû embaucher des personnels de l’Etat et s’adapter à leurs nouvelles tâches.

 

 

 

Des régions qui augmentent les impôts, une « folie fiscale » ?

 

Trois vérités qui tiennent en trois chiffres :

  • Sur 100 euros d’impôt en 2009, l’Etat prélève 78 euros, la région prélève 2 euros.
  • Entre 2003 et 2009, l’augmentation des impôts des régions représente en moyenne 3 euros par habitant et par an.
  • La région qui a le plus augmenté son taux d’imposition entre 2007 et 2009 est l’Alsace (+14,3%), une des rares régions de France dirigée par la majorité présidentielle

 


 

CE QUE LE GOUVERNEMENT NE DIT PAS
Les collectivités créent de la croissance et de l’emploi

 

Les collectivités locales réalisent 73 % de l’investissement public. La commande publique locale assure chaque année prés de 50% du chiffre d’affaire des travaux publics contre 6% pour l’Etat.

Depuis 2003, l’accroissement de l’investissement public local a permis de créer 200 000 emplois dans le privé.

L’investissement des collectivités territoriales génère une activité économique représentant le maintien direct ou indirect de 850 000 emplois (construction, services et industrie).

 

 

 

Les collectivités protègent, innovent et entreprennent

 

La preuve est faite de la qualité des services dont les collectivités ont la charge depuis les lois de décentralisation : amélioration des établissements scolaires, des trains régionaux, des infrastructures routières, mais aussi de l’attention portée aux services à la personne, petite enfance, personnes âgées ou atteintes de handicap, initiatives en faveur de l’insertion professionnelle.

Les collectivités mènent de nombreuses politiques innovantes au titre du développement durable (promotion des transports alternatifs, énergies renouvelables, construction d’habitations « HQE », éco-quartiers et de l’agriculture « bio »)

Elles associent, au niveau local, progrès scientifique, exigence écologique et développement économique.

L’asphyxie financière entrainée par la non-compensation de la taxe professionnelle, la suppression de la « clause de compétences générale », la fin des co-financements, ne permettront plus aux collectivités d’assumer aussi bien ces missions de service public et de soutenir les associations qui agissent, quotidiennement, pour la cohésion sociale, la culture, le sport ou l’éducation.

 

 

 

L’Etat est endetté à l’égard des collectivités territoriales

 

L’Etat transfère des compétences nouvelles aux collectivités locales, sans compenser l’augmentation de ces charges. Par exemple, alors que l’Etat a chargé les départements de gérer les allocations de solidarité (RMI - RSA, APA et PCH), la dette cumulée de l’Etat envers les départements pour ces seules allocations atteint 6,8 milliards d’euros en 2009. Le Conseil d’Etat, dans une décision du 30 décembre 2009, a d’ailleurs donné raison à deux départements qui réclamaient la création d’un fonds de compensation pour la petite enfance que l’Etat leur refusait.

 

 

 

L’Etat prive les collectivités de leurs dotations budgétaires

 

Alors que, conséquence de la crise économique, les communes, départements et régions sont confrontées à :

  • la diminution de leurs ressources avec la baisse des droits de mutation.
  • l’augmentation des besoins en matière de politiques sociales (RMI-RSA, APA, PCH, tarifs dégressifs pour de nombreux services, demandes de logement…).

Le gouvernement baisse les dotations aux collectivités : la dotation globale de fonctionnement n’augmentera en 2010 que de 0,6% quand l’inflation est estimée à 1,2% et le « panier du maire » augmente de 3%. L’augmentation des besoins en matière de politique sociale, avec des dépenses dites dynamiques qui croissent de 4 à 6 % chaque année.

Le gouvernement baisse les dotations aux collectivités. Au Fort de Brégançon cet été, Nicolas Sarkozy a annoncé « un gel en valeurs », synonyme de recul, des dotations de l’Etat aux collectivités. Avec cette nouvelle baisse de ressources, et l’entrée en vigueur de la suppression de la taxe professionnelle en 2011, l’asphyxie financière des collectivités est totale.

 

 

 

L'objectif réel de création du conseiller territorial

 

Le Gouvernement veut mettre en place un conseiller territorial qui cumulera les mandats de conseiller général et de conseiller régional, alors que 90% des compétences de ces collectivités sont dissociées !

Des conflits d’intérêts de gestion s’exprimeraient à chaque niveau de collectivité :

Pour les départements : moins de proximité des élus avec nos concitoyens et moins de disponibilité : c’est une atteinte au rôle traditionnel des conseillers généraux - plus encore dans les départements ruraux - aux politiques de solidarité et à la démocratie locale.

Pour les régions : risque que l’élu, rattaché à un canton (et avec une charge de travail exorbitante) accorde une priorité aux affaires purement locales, au détriment des projets relevant de la dimension régionale. Menace pour les politiques d’aménagement du territoire, qui ne pourront résulter de la simple addition d’intérêts cantonaux.

 

 

 

La modification du mode de scrutin : affaiblir la gauche et la parité

 

Après des péripéties parlementaires dignes d’un mauvais vaudeville, le scrutin uninominal majoritaire à deux tours a finalement été retenu comme mode de désignation des conseillers territoriaux. Conjuguée à un savant redécoupage des cantons, cette mesure conduira inévitablement à l’affaiblissement de la gauche, pénalisée par les cruels mais habiles ciseaux du gouvernement, et de la parité, attaquée par le biais d’un mode de scrutin défavorable aux femmes. Le conseiller territorial sera majoritairement « homme et de droite ».

 

 

 

La suppression de la taxe professionnelle amputera le pouvoir d’achat

 

Le Gouvernement a décidé de supprimer la taxe professionnelle au 1er janvier 2010. Selon les chiffres officiels, les entreprises auront environ 22 milliards d’euros d’impôts en moins à payer. Pour compenser la perte de recettes, le Gouvernement propose que les entreprises, par la création d’une nouvelle taxe, participent à hauteur de 10 milliards.

Près de 12 milliards d’euros restent donc à trouver pour 2010 ; près de 6 milliards pour les années suivantes.

Qui va payer ces milliards ? La réponse est simple :

Si le Gouvernement choisit un financement par les dotations budgétaires, elles-mêmes fragiles, l’imposition sur les ménages augmentera.

Si le Gouvernement choisit un financement par le déficit budgétaire, qu’il faudra rembourser tôt ou tard, l’imposition des ménages augmentera aussi.

Si le Gouvernement choisit un financement par le concours des collectivités locales, l’imposition des ménages augmentera.

La suppression de la taxe professionnelle transfère la fiscalité des entreprises vers les ménages.

 

Publié dans Débat

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